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Déchéance du droit de visite du père en raison de ses convictions religieuses : discrimination

Le 01 mars 2013
Viole l’article 14 (interdiction de la discrimination), combiné avec l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme, les juridictions hongroises qui, pour préserver les intérêts supérieurs de l’enfant, ont prononcé la déchéance du droit de visite du père en raison de ses convictions religieuses.

Après son divorce, et plusieurs demandes en révision de son droit de visite restées infructueuses, un ressortissant hongrois s’est vu déchu de son droit par les juridictions nationales au motif que ce dernier imposait ses convictions religieuses à son fils.

Devant la CEDH, l’homme invoque l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale), l’article 9 (liberté de religion) et l’article 14 (interdiction de la discrimination) de la Convention européenne des droits de l’homme et soutient que cette suppression de droit était motivée par ses croyances religieuses et qu’il avait été traité différemment d’autres personnes demandant un droit de visite après un divorce ou une séparation.

La Cour conclue à la violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination), combiné avec l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Conv. EDH.

Elle souligne tout d’abord, l’importance des relations parents/enfants comme élément fondamental de la vie familiale.

Elle reconnaît, ensuite, que le fondement retenu par les juridictions nationales pour prononcer la déchéance (à savoir la pratique de sa religion) a pour conséquence de traiter différemment le requérant par rapport à d’autres parents placés dans une situation semblable mais qui n’auraient pas de fortes convictions religieuses.

Suivant les critères clairement établis par sa jurisprudence, la Cour qualifie cette différence de discriminatoire car non fondée sur une justification objective et raisonnable (absence de preuves suffisantes pour établir le caractère dommageable et dangereux pour l’enfant de la pratique de cette religion).

La Cour précise, enfin, que l’intérêt supérieur de l’enfant justifie une protection, mais que seules des circonstances exceptionnelles peuvent légitimer une mesure aussi radicale que la suppression de tout lien entre un père et son enfant.

Elle regrette qu’une mesure intermédiaire, comme un droit de visite assorti de mesures de contrôle, n’ait pas été envisagée par les juridictions hongroises.

À titre d’exemple, en France, le juge peut suspendre ou limiter les modalités d'exercice de ce droit lorsque l'intérêt d'un enfant l'exige au regard du comportement ou de l'attitude de l'un de ses parents, notamment en autorisant uniquement un droit de correspondance.

Soucieux que le lien entre les parents et l’enfant ne soit rompu que de manière exceptionnelle, le législateur français a précisé que ce droit ne peut être refusé que pour « des motifs graves » (C. civ., art. 373-2-1).

Si les juges sont très réticents à refuser un droit de visite au parent non titulaire de l'exercice de l'autorité parentale, ils admettent toutefois que certaines circonstances les y obligent (appréciation souveraine des juges du fond).

Il en va ainsi par exemple de la brutalité d’un parent (v. à propos de l’alcoolisme d’un père : Agen, 5 nov. 1992), du danger pour la santé ou l’équilibre de l’enfant (v. sur les mœurs d’un père qui projetait des vidéos de scènes érotiques à ses enfants : Rennes, 3 mars 1994), et enfin, le fait pour un parent de faire peser sur sa fille des pressions morales et psychologiques d’ordre religieux (Civ. 1re, 24 oct. 2000).

La décision commentée s’inscrit donc dans la jurisprudence constante de la Cour européenne des droits de l’homme qui se veut protectrice des ingérences dans la vie familiale (v. déjà pour une mesure de retrait de l’autorité parentale à des parents témoins de Jéhovah).

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